Résumé :
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Les anticholinestérasiques les plus connus tels que les dérivés de la physostigmine ou les organophosphores présentent une affinité relativement faible pour l'acétylcholinestérase. Ces composés constituent la principale thérapeutique des altérations de la transmission cholinergique notamment dans la myasthénie grave et dans la maladie d'Alzheimer, l'inhibition de l'acétylcholinestérase induisant chez ces malades une certaine récupération en prolongeant l'action l'ACh. Cependant, administrés de manière répétée, ils induisent des altérations de la jonction neuromusculaire liées à leur manque de spécificité : en effet, la majorité de ces composés se lie, entre autres, au récepteur de l'ACh postsynaptique. Ce travail s'est attaché à décrire les effets physiologiques d'un agent anticholinestérasique peptidique purifié du venin de serpent Dendroaspis angusticeps : la fasciculine-1(FAS1), sur la transmission neuromusculaire, in vitro. La FAS1 présente une très forte affinité (Ki=10-10M) pour l'AChE purifiée. Nous avons observé que dans des conditions physiologiques, la FAS1(10-100nM) augmente l'amplitude et allonge le temps de montée et le temps de décroissance des courants miniatures de plaque motrice dans les mêmes proportions (de 20 à 30%), et ce progressivement. Ces résultats confirment une inhibition profonde de l'AChE dans les conditions physiologiques. Cependant, la FAS1 augmente les courants synaptiques évoqués par stimulation nerveuse de près de 100%. Ce dernier effet qui intervient immédiatement après l'application de la FAS1 ne peut s'expliquer par la seule prolongation de la durée de vie de l'ACh due à inhibition de l'AChE. La FAS1 pourrait donc augmenter la libération d'ACh par les terminaisons synaptiques. De plus, la FAS1 agit aussi présynaptiquement en augmentant la fréquence des courants miniatures ainsi que celle des courants miniatures "géants". Cependant la FAS1 n'interfère pas avec la facilitation présynatique induite par une paire de stimulations nerveuses. Elle n'a aucun effet inhibiteur sur les nRACh. Les effets de la FAS1 sont lentement réversibles. La FAS1 présente donc un intérêt à la fois pour l'étude du fonctionnement des synapses cholinergiques et dans certaines applications thérapeutiques. Déjà utilisée dans le traitement du glaucome, la FAS1 pourrait présenter une nouvelle perspective dans le traitement de certaines myasthénies. Parallèlement nous avons tenté d'identifier les cibles des anticorps pathogènes de deux maladies auto-immunes de la jonction neuromusculaire qui se traduisent par le blocage de la transmission synaptique et d'étiologie voisine de la myasthénie grave : le syndrome myasthénique de Lambert-Eaton et le syndrome myasthénique à faible taux d'anticorps anti-nRACh. La même approche a permis à un autre groupe de montrer que dans le syndrome myasthénique de Lambert-Eaton, les anticorps auto-immuns responsables de la maladie seraient dirigés contre des canaux calciques de la terminaison axonale, ou contre des protéines qui leur seraient associées. L'étude des affections pathologiques de la jonction neuromusculaire ainsi que l'emploi d'anticorps interférant avec la transmission synaptique permettra de déterminer le rôle de nouvelles protéines impliquées dans ce mécanisme.
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