Résumé :
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La maladie de Sandhoff ou gangliosidose à GM2 variant 0 est une affection à transmission autosomique récessive, due à des mutations du gène HEXB codant la chaine beta des hexosaminidases. Elle s’accompagne d’un double déficit en Hex A (alpha beta) et Hex B (beta beta), responsable d’une accumulation de gangliosides GM2, principalement dans le système nerveux central (SNC). Sur le plan clinique, cette maladie débute généralement dans les premiers mois de la vie et conduit au décès vers l’âge de 2-3 ans. Un modèle animal a été obtenu par invalidation du gène HEXB, mimant assez bien la maladie humaine et constituant un bon outil pour les études physiopathologiques et la mise au point d'approches thérapeutiques, sachant que cette maladie évolue inexorablement vers le décès. Au cours de mon projet de thèse, j'ai décidé d'explorer différentes stratégies thérapeutiques, basées soit sur des thérapies moléculaires ciblées, soit sur un transfert de gènes à l'aide d'un vecteur de type AAV. Pour développer la première approche, des études moléculaires préalables ont été réalisées chez des patients français et libanais atteints de maladie de Sandhoff. Nous avons pu montrer qu'en France, 36% des allèles sont porteurs d'une grande délétion de 16 kb, les autres mutations étant assez hétérogènes. A l'inverse, au sein de la population libanaise, tous les patients sont porteurs d'une même mutation d'épissage appelée c.1082+5G>A. Des fibroblastes ont été obtenus pour certains de ces patients et ces cellules ont été utilisées pour tester l'effet d'une molécule, la pyriméthamine, qui a été décrite comme pouvant avoir un effet chaperon sur certaines mutations dans la maladie de Tay-Sachs, une autre forme de gangliosidose à GM2. Chez les patients Sandhoff testés, nous avons pu observer une augmentation de l'activité des hexosaminidases sous l'effet du médicament (analyse faite avec le substrat artificiel), mais des tests métaboliques ont montré que le substrat naturel (GM2) ne peut pas être dégradé. Au final, dans la maladie de Sandhoff, la pyriméthamine n'est pas active sur l'Hex A, mais seulement sur l'Hex S (homodimère alpha alpha) qui n'a pas de rôle physiologique connu. L'essentiel de mon projet a été focalisé sur la mise au point d'un transfert de gènes basé sur l'utilisation d'un vecteur AAV9, qui a précédemment démontré sa capacité à transduire le SNC après administration par voie veineuse. Un vecteur AAV9 codant la chaine beta des hexosaminidases sous le contrôle du promoteur PGK a donc été construit et il a été administré au niveau de la veine temporale chez des souriceaux Hexb-/- en période néonatale. Un groupe d'animaux a été suivi à long terme afin d'étudier leur survie et leur comportement, un autre a fait l'objet d'études enzymatiques, biochimiques et histologiques. Les animaux injectés ont un allongement significatif de leur espérance de vie (>500 jours au lieu de 120 jours en moyenne chez des animaux Sandhoff non traités) et leur comportement (rotarod, actimètre, ...) est comparable à celui des animaux normaux. Par ailleurs, l'analyse histologique a montré l'absence de surcharge et de signes de neuroinflammation (astrocytose, microgliose) chez les animaux traités. De plus, l'étude des lipides cérébraux révèle une accumulation nette de GA2 et GM2 chez les souris Sandhoff, mais un profil quasiment normal chez les souris Hexb-/- injectées avec le vecteur thérapeutique. Il est à noter que ces résultats ont été obtenus malgré une restauration enzymatique partielle, liée à la large diffusion du vecteur administré par voie intraveineuse. Ces données encourageantes pourraient permettre une application chez l'homme, après évaluation chez des animaux traités à un âge plus tardif (plus grande pertinence clinique).
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