Résumé :
|
Des frères et soeurs d'enfant atteints de maladies neuromusculaires s'engagent dans un pacte de solidarité visant à préserver la famille. Certains essaient d'échapper à ces contraintes familiales par des rêves de fuite. D'autres contournent les conflits familiaux en idéalisant l'enfant malade... Les liens fraternels contribuent à l'affirmation identitaire et à l'ouverture sociale de l'enfant mais, ils ne sont pas exempts d'obstacles. les enfants sont confrontés à la rivalité, l'agressivité, ils doivent trouver des compromis. La conquête identitaire et affective sera d'autant plus facilitée que l'espace psychique familial les autorise à exprimer leurs conflits et peut les contenir. Les frères et soeurs d'enfants atteints de maladies neuromusculaires (MNM) sont dans une situation particulièrement anxiogène. L'annonce de la maladie a brisé l'élan familial, fait surgir des peurs, des angoisses de mort et de la culpabilité. Le risque d'évolutivité de la maladie attise sans cesse l'anxiété. Une étude clinique(1)a été conduite auprès de 26 enfants, frères et soeurs d'enfants atteints de MNM (âgés de 6 à 10 ans), afin d'évaluer les moyens utilisés, par chacun, pour gérer les charges émotionnelles et physiques. Les entretiens, les dessins et les jeux de ces enfants ont permis de saisir leur sentiment identitaire, la représentation de leur environnement affectif ainsi que les modalités d'expression des affects. La maladie retentit sur toutes les sphères de leur vie psychique. Ils sont " le frère ou la soeur d'un enfant malade ", ils ont des parents affaiblis par les charges psychiques et physiques et leur vie affective est brouillée par le retentissement de la maladie. Par adhésion à un pacte de solidarité familiale, des frères et soeurs contournent les conflits fraternels, abandonnent une part de leur identité, confondent leurs sentiments et sacrifient leur imaginaire. Le handicap psychiquement partagé crée un lien que l'enfant (non malade) tente d'aménager mais dont il reste provisoirement dépendant par l'illusion réparatrice qu'il maintient. Il peut arriver que les affects liés au handicap aient de telles ramifications, si complexes, si enfouies, que la souffrance familiale ne peut s'assimiler et fait empreinte en soi. Ainsi par les échanges identificatoires inhérents au lien fraternel et par l'effraction psychique provoquée par le traumatisme, le handicap de l'enfant malade produit du handicap chez son frère ou sa soeur non malade. L'idéalisation de l'enfant malade (rendu à la fois éloigné et intouchable), très souvent mise en oeuvre par ses frères et soeurs, est apparue comme un mécanisme de défense efficace pour tenter de se dégager de la relation trop proximale au frère ou à la soeur malade. Ce mécanisme impose toutefois des contraintes qui nécessiteront des assouplissements avant de devenir insupportables. Ainsi certains adolescents, les ressentant comme un carcan pour l'élan émancipatoire, rêvent de fuite mais butent alors sur une taraudante culpabilité. Bulletin Myoline, n° 82, janvier-février 2006, p. 2
|