Résumé :
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La transmission neuromusculaire est assurée par un continuum de réactions en cascade, menant du signal axonal à la contraction de la fibre musculaire. Cet ensemble implique, au delà du seul lieu de la jonction neuromusculaire, la membrane plasmique de la fibre musculaire, où la propagation du potentiel d’action est couplée à une intense activité du réticulum sarcoplasmique (RS) régulant les flux de calcium. Cette thèse apporte une contribution à la connaissance de ces mécanismes par l’exploration de deux maladies neuromusculaires humaines rares, les syndromes myasthéniques congénitaux (SMC) et les myopathies à agrégats tubulaires (MAT). Ces deux affections peuvent se recouper et former une entité nosologique mal caractérisée, les myopathies à agrégats tubulaires avec des signes myasthéniques. Les SMC sont caractérisés par un défaut génétique de la transmission neuromusculaire. Un récepteur tyrosine kinase spécifique du muscle, MuSK, activé par l’agrine neuronale, est au centre d’une plate-forme multi-protéique régulant l’ensemble des mécanismes de la différenciation de l’appareil post-synaptique de la jonction neuromusculaire (JNM). Aucune anomalie génétique de MuSK n’avait encore été décrite dans l’étiologie des SMC. Deux mutations hétéroalléliques dans le gène MuSK ont été mises en évidence chez une patiente dont l’étude des plaques motrices a révélé une dysinnervation fonctionnelle et une diminution de la protéine MuSK. L’analyse de l’expression et des répercussions fonctionnelles de ces mutations in vitro et in vivo confirment leur caractère pathogène. La première mutation modifie le cadre de lecture et entraîne l’apparition d’un codon stop prématuré. Cette mutation aboutit à l’absence de protéine et à une haplo-insuffisance. La deuxième mutation est une muta tion faux-sens, compensée par l’existence d’un allèle normal chez le parent hétérozygote asymptomatique et démasquée chez la patiente par l’association à un allèle nul. Elle est localisée dans le domaine kinase de MuSK conférant une instabilité à la protéine et entraînant, pendant les étapes initiales de la synaptogenèse, une diminution de l’agrégation des récepteurs de l’acétylcholine (RACh). L’activité kinase intrinsèque de MuSK n’est pas affectée. La sur-expression par électrotransfection de cette mutation dans un muscle squelettique de souris normale adulte modifie l’architecture et la maintenance des JNM de façon similaire à ce qui est observé chez la patiente, en particulier un désassemblage de l’appareil post-synaptique et un bourgeonnement axonal excessif. La mutation faux-sens de MuSK, en plus de ses répercussions sur les étapes précoces de la formation des JNM, entraîne un défaut de leur maintenance à l’âge adulte et aboutit à l’induction d’un SMC. Les myopathies à agrégats tubulaires au phénotype variable et à l’étiologie inconnue, se caractérisent par la présence prédominante dans le muscle d’une accumulation de tubules juxtaposés impliquant le RS dont la signification n’est pas élucidée. Nous montrons que l’un des trois phénotypes de ce syndrome, une myopathie des ceintures avec des signes myasthéniques (LGM) est associé à des anomalies morphologiques des JNM et à des variations moléculaires suggérant un trouble de l’activité électrique. Les LGM sont à classer dans les SMC. Cette étude renforce la notion que les AT sont des anomalies dont la seule présence est insuffisante pour établir la classification nosologique et qu’elles sont souvent associées à des troubles de l’excitation musculaire. Grâce à un ensemble d’anticorps dirigés contre des protéines localisés dans des régions bien individualisées du réticulum sarcoplasmique, des mitochondries et du noyau, nous montrons dans le muscle humain et chez la souris que leur composition moléculaire est caractéristique du RS dans son entier mais aussi des sites de sortie du RE. Une néo-formation est suggérée. Les AT, équipés pour la libération, le stockage et la re-capture du calcium pourraient participer à son homéostasie dans des conditions pathologiques variées où sa concentration intracellulaire devient excessive. L’ensemble de ce travail a permis d’incriminer un nouveau gène comme porteur de mutations induisant un syndrome myasthénique congénital. L’appartenance aux SMC et la localisation à la JNM du défaut moléculaire sous-jacent d’un sous-groupe de patients atteints de myopathie à agrégats tubulaires sont fortement suggérées. La connaissance de la structure moléculaire des AT a été étendue.
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